Vous êtes enceinte et aimeriez être conseillée sur votre futur allaitement ?
Vous allaitez et êtes confrontée à des problèmes de seins douloureux, de prise de poids insuffisante ou de mauvaise succion ?…
Face à ces questions, ces doutes, ces difficultés, il est primordial d’être bien accompagnée.
Tel est le rôle de Céline Guerrand, infirmière et consultante en lactation IBCLC, installée à Aix-en-Provence.
Au travers de cette interview, nous découvrons quand faire appel à une consultante en lactation, pourquoi choisir une consultante certifiée IBCLC et quels conseils suivre pour se donner toutes les chances de réussir son allaitement.
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Sommaire
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- Découvrons le parcours de Céline
- Qu’est-ce-que la certification IBCLC ?
- En quoi consiste le renouvellement de cette certification ?
- Comment devenir consultante en lactation IBCLC ?
- Pourquoi choisir cette spécialité en lactation ?
- Comment trouver une consultante en lactation IBCLC près de chez soi ?
- Comment se déroulent le premier rendez-vous et le suivi ?
- Quelles difficultés d’allaitement sont le plus souvent constatées ?
- Les conseils de Céline
Bonjour Céline et merci d’avoir accepté cet échange. Pour commencer, pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
Bonjour, je m’appelle Céline Guerrand. J’ai 42 ans et j’ai 6 enfants, de 19 ans à 3 ans.
Avec une formation initiale d’infirmière, j’ai fait 10 ans en réanimation adulte puis en néonatalogie, avant de me spécialiser en douleur, en neurologie, puis en soins de développement.
Je suis également bénévole dans une association de soutien à la parentalité que j’ai fondée en 2003. C’est dans ce cadre que je me suis formée à l’allaitement, au portage, au massage et à la relation d’aide aux parents.
En 2009, je deviens consultante en lactation. J’exerce exclusivement en libéral depuis 2010. J’ai actualisé ma certification IBCLC en 2014 et en 2019 (ndlr : on parle alors de recertification).
J’ai développé en parallèle une activité de formation avec la création de l’Association Française du Portage de Bébé en 2005, qui s’adresse à des professionnels de santé et à des animatrices de portage.
Vous êtes donc consultante en lactation IBCLC. Pourriez-vous expliquer en quoi consiste votre métier ? Que signifie le sigle « IBCLC » ?
La certification IBCLC (International Board Certified Lactation Consultant) garantit le contrôle d’un organisme indépendant et international qui vérifie la validation d’un certain nombre de critères.
Pour pouvoir passer l’examen de consultante en lactation IBCLC, il est au préalable nécessaire :
- de disposer d’un bagage de formation en santé (diplôme ou équivalence),
- d’avoir suivi un cursus de formation agréé dans les 5 ans qui précède le moment où on se présente pour l’examen de consultante
- d’avoir cumulé un nombre minimum de 1 000 heures de pratique clinique auprès des mères allaitantes.
L’examen comporte 3 dimensions : les connaissances théoriques, les éléments pratiques et la dimension éthique (qui concerne par exemple l’attitude à adopter auprès des parents).
Ainsi, le fait de s’adresser à une consultante en lactation IBCLC assure une attitude, des connaissances ainsi que des pratiques contrôlées.
Il existe un système de renouvellement de la certification IBCLC : Quand renouveler ? Pourquoi ? Comment ça se passe ? Et si on décide de ne pas renouveler ?
Le diplôme de consultante en lactation IBCLC est valable 5 ans.
Le renouvellement est obligatoire : nous avons obligation de travailler sur une médecine fondée sur les preuves, d’être à jour sur les dernières informations de santé et la pharmacologie. Par ailleurs, l’organisme de certification vérifie que nous répondons toujours aux critères requis pour exercer.
Au bout de 5 ans, nous devons donc de nouveau constituer un dossier. Celui-ci comporte notamment un engagement sur l’honneur, ainsi que les éléments attestant de notre formation tout au long de ces 5 années — les formations et colloques suivis devant répondre à des critères éthiques définis par le bureau. Cette validation s’effectue donc sur pièces justificatives.
Au bout de 10 ans, on repart de zéro et il faut tout repasser. Le fait de devoir valider de nouveau tous ses acquis constitue une pratique assez courante pour les professionnels de santé des pays anglo-saxons. En revanche, ce n’est pas le cas en France : les consultantes en lactation IBCLC figurent parmi les seuls professionnels de santé français à devoir le faire.
Sans le label IBCLC, il n’y a pas de garantie sur la dimension théorique, pratique et éthique de leur expertise.
Quelles formations initiales sont possibles pour devenir consultante en lactation IBCLC ?
Pour devenir consultante en lactation IBCLC, il faut un minimum de Bac+2 en santé (infirmière, diététicienne, psychomotricienne, sage-femme…).
Pour celles qui ne disposent pas de cette formation de base — une animatrice de groupe de soutien à l’allaitement par exemple —, il est également possible de suivre des formations complémentaires à la faculté et d’obtenir des équivalences.
Pourquoi avoir choisi cette spécialité en lactation ?
En tant que bénévole d’association, j’ai rencontré beaucoup de parents en détresse au niveau de l’allaitement. J’avais moi-même une longue expérience d’allaitement avec mes enfants. J’ai alors constaté que les professionnels de santé n’avaient quasiment pas de formation dans le domaine de l’allaitement maternel.
En tant que consultante en lactation, ma mission est de proposer un accompagnement à la parentalité, c’est-à-dire d’aider les parents à détecter les signes chez leur bébé et à s’y adapter. C’est le plus gros travail d’une consultante en lactation, qui vise à résoudre des troubles divers comme les reflux, la douleur… Il faut donc réaliser un examen clinique complet du bébé pour comprendre à quel endroit le bébé éprouve des difficultés.
Notre travail se décline en 2 volets :
- Le premier consiste à proposer l’alimentation la mieux adaptée au bébé, qui soit également le mode le plus confortable possible pour les parents (quels que soient les problèmes du bébé, même en cas de malformation par exemple)
- Le deuxième consiste à réorienter l’enfant vers d’autres professionnels de santé si on identifie un besoin spécifique (ORL, ostéopathe, psychomotricien par exemple)
Une consultante en lactation BCLC travaille toujours en réseau, avec des sage-femmes, pédiatres et divers spécialistes.
En quoi votre métier d’infirmière vous aide-t-il au quotidien à mieux accompagner les mamans sur leurs problématiques d’allaitement ?
Je dispose d’un bagage standard, avec notamment une formation en neurologie, douleur et soins de développement.
Comme je suis issue du monde du soin, cela donne des nuances dans ma façon d’accompagner les parents.
Par ailleurs, ma connaissance en pharmacologie me permet de mieux comprendre certains domaines, comme la compatibilité des médicaments avec l’allaitement ou la biochimie du lait par exemple.
Quelle est la valeur ajoutée d’une consultante en lactation IBCLC par rapport à une sage-femme (ou autre professionnel de santé) qui n’aurait pas cette certification ?
Une sage-femme ayant suivi la formation classique n’a généralement pas assez de connaissances théoriques.
Selon le rapport TURCK datant de 2010, la formation de sage-femme ne comprend que 20 heures en moyenne sur l’allaitement ; ce qui est totalement insuffisant pour accompagner les problèmes rencontrés par les mamans.
Pour les pédiatres et gynécologues, le cursus ne prévoit qu’une heure de formation sur l’allaitement.
Comment connaître les consultantes en lactation IBLCL à proximité de chez soi ?
En France, le répertoire le plus précis est celui de l’Association Française des Consultants en Lactation.
Le site IBLCE (International Board of Lactation Consultant Examiners) permet de vérifier la certification d’une personne ; ce qui est très important car il existe aujourd’hui un gros business autour de l’allaitement et de la parentalité.
Le site VanillaMilk vérifie également la certification des professionnels référencés.
Dans quel contexte les mamans font-elles appel à vous ?
Il existe une multitude de contextes qui donnent lieu à une consultation en lactation.
Certaines mamans souhaitent vérifier que tout va bien et veulent obtenir plus d’informations sur l’allaitement.
D’autres consultent quand elles ont des douleurs aux seins dues à l’allaitement, quand le bébé présente des problèmes de prise de poids…
Mais il peut aussi y avoir des consultations au moment de la reprise du travail, de la diversification alimentaire, ou quand le bébé rencontre des problèmes de succion ou de reflux. Dans ce dernier cas, s’il s’agit de bébés nourris au biberon, la consultation s’effectue généralement sur recommandation d’autres professionnels de santé.
Comment se déroule un premier rendez-vous ?
Les rendez-vous ne se ressemblent pas car on s’adapte au rythme du bébé. Le déroulement de la consultation dépend donc de la disponibilité du bébé : Est-il prêt à manger ou pas ? La mère présente t-elle de grosses douleurs ou pas ?
Toutefois, chaque consultation comprend :
- Un temps d’accueil
- Un moment consacré à l’historique de l’enfant
- Un examen clinique du bébé et de la maman
- Un temps d’observation de l’alimentation
- Puis des propositions de pistes pour trouver des solutions.
Un rendez-vous dure au minimum une heure, et peut parfois durer deux heures en cas de situations compliquées.
Les objectifs de ce premier rendez-vous :
- Conforter les parents dans leur rôle parental,
- Leur permettre de repartir avec des pistes pour résoudre leurs difficultés,
- Et éventuellement leur fournir une liste de professionnels vers lesquels se tourner en cas de problèmes.
Comment se déroule le suivi avec une consultante en lactation IBCLC ?
Après le premier rendez-vous, un suivi n’est pas toujours nécessaire même s’il est fréquent.
La plupart des consultantes assurent un suivi par sms ou par téléphone. Pour ma part, je passe des heures par sms en complément des consultations pour conseiller et accompagner les mamans.
Par ailleurs, la consultation en lactation sera d’autant plus efficace si la maman rejoint ensuite des groupes. Sur le long cours, le soutien par les pairs s’avère très positif : c’est la raison pour laquelle les consultantes en lactation travaillent souvent en réseau avec des associations et des groupes de soutien.
Quelles sont les difficultés d’allaitement / les situations les plus souvent constatées ?
Les situations que je rencontre le plus couramment sont celles de bébés désorganisés : les bébés ne savent pas téter car, bien souvent, ils ont été perturbés par leurs conditions de naissance.
Quand l’accouchement est mobile, qu’on pratique le peau-à-peau et qu’on ne perturbe pas le bébé dans ses apprentissages, normalement il y a peu de soucis. Les trois ou quatre premiers jours, il est important que la maman et le bébé apprennent à se connaître, et que le bébé apprenne à téter seul.
Mais, s’il est habillé, contraint et tenu, son apprentissage devient plus compliqué. Certaines approches entravent également cet apprentissage. Le vocabulaire même utilisé est inadéquat. Par exemple, l’expression de ‘mise au sein’ ne devrait pas exister : c’est l’enfant qui est censé faire tout seul.
Quels conseils donneriez-vous aux mamans / futures mamans pour échapper à ces difficultés ?
D’abord, il est important de tout faire pour avoir un bébé le plus en forme possible à l’accouchement : il faut donc opter pour un accouchement le plus naturel possible.
Ensuite, la pratique du peau-à-peau permet de bien observer son bébé. En mettant le bébé nu (en couche avec une couverture, bonnet, chaussons), la maman est encouragée à garder son bébé avec elle « non stop ». Les tétées sont plus fréquentes, les montées de lait plus souples, le bébé est moins à la merci des autres et il est plus libre de ses mouvements.
Les premiers jours, il est essentiel de maintenir un lien de forte proximité entre la mère et l’enfant.
Ce que je conseille pour favoriser cette proximité, c’est de limiter le matériel emmené à la maternité : pas besoin de crèmes ni de bouts de sein. Une couverture en laine, un bonnet, des chaussons et des tissus pour porter le bébé (paréo ou pashmina) suffisent.
Est-il possible de consulter en préventif, c’est-à-dire avant même d’accoucher pour bénéficier des bons conseils ?
Oui. D’ailleurs, plusieurs consultantes en lactation proposent déjà ces consultations préventives.
Le mieux est de venir en fin de grossesse, surtout si la maman a des inquiétudes sur son allaitement à venir (si elle a un mamelon ombiliqué par exemple, qui ne constitue d’ailleurs absolument pas un frein à l’allaitement, contrairement aux idées reçues).
Quand les mamans sont en détresse après leur accouchement, c’est très rassurant pour elles d’aller voir quelqu’un qu’elles connaissent déjà.
Selon vous, quelles sont les principales problématiques qui existent aujourd’hui autour de l’allaitement maternel ?
La principale problématique est liée à la culture française sur l’allaitement, avant même les questions d’accompagnement ou de formation des professionnels de santé.
En France, il existe une culture et une norme du biberon, et non une norme de l’allaitement.
Les courbes du carnet de santé ne sont pas adaptées aux bébés allaités. La taille des petits pots institue une norme de comportement et de quantité qui est très éloignée des normes alimentaires des bébés allaités. Ce qui rend les parents perdus et inquiets.
Par ailleurs, la France a ratifié le Code de Commercialisation des Substituts au Lait Maternel de l’OMS en 1981. Mais ce code n’est pas appliqué : il ne devrait par exemple y avoir aucune publicité qui compare tétine et sein…
S’il ne devait y en avoir qu’un, quel serait votre meilleur conseil à l’attention des futures mamans qui se préparent à allaiter leur bébé à venir ?
Ce que je conseillerais aux futures mamans, c’est :
- D’abord de regarder des vidéos de bébés qui tètent seuls au sein : les vidéos de biological nurturing (BN) par exemple.
- Puis de trouver un groupe de soutien à l’allaitement à proximité de chez elle, et de participer à des réunions en fin de grossesse.
- Enfin, je recommande d’identifier une consultante en lactation (ou d’autres soutiens à l’allaitement) avant l’accouchement, pour savoir qui contacter en cas de difficulté.
Si vous disposiez d’une baguette magique, que changeriez-vous en France pour faire progresser les taux d’allaitement maternel ?
J’arrêterais les injonctions faites aux mères : il existe beaucoup d’injonctions non fondées (par exemple sur la tétine) qui participent au fait de croire que l’allaitement est fragile.
Or, c’est faux : l’allaitement, c’est biologique. Non, la lactation ne peut pas baisser du jour au lendemain. Et oui, un bébé peut reprendre un allaitement qui aurait été interrompu 6 mois plus tard !
Un petit mot sur VanillaMilk ?
La plateforme VanillaMilk est un super outil pour permettre aux mamans d’identifier les ressources à côté de chez elles, et de faire la différence entre le groupe de soutien, la sage-femme qui travaillera en prévention, la consultante en lactation IBCLC…
C’est quasiment le seul outil qui offre cette possibilité, avec en plus un contrôle des diplômes au préalable et une identification des différentes catégories grâce aux pastilles de couleurs.
Profil VanillaMilk : Céline Guerrand – Infirmière et consultante en lactation IBCLC à Aix en Provence (13)