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L’allaitement en France et dans d’autres pays

Quelle est la situation actuelle de l’allaitement en France par rapport à d’autres pays ? Comment les pratiques évoluent-elles ? Sur quels leviers jouer pour mieux soutenir l’allaitement ?

Pour répondre à ces questions, nous avons rencontré Britta Boutry.

Japonologue de métier, Britta a découvert l’allaitement en tant que maman. D’abord engagée bénévolement dans La Leche League France, Britta devient consultante en lactation IBCLC, puis coordinatrice de la World Breastfeeding Trends initiative (WBTI) en France en 2017.
Elle est aujourd’hui consultante en Suisse auprès de l’Association Genevoise pour l’Alimentation Infantile (GIFA)

Bonjour Britta et merci d’avoir accepté cet échange. Pour commencer, pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?

Portrait Britta BoutryJe m’appelle Britta Boutry. J’ai 59 ans et je suis maman de 3 enfants. 

Après avoir participé à des réunions de La Leche League en tant que maman allaitante, cela m’avait beaucoup inspirée et j’ai décidé d’en devenir animatrice tout en continuant à exercer mon métier de japonologue.

Il y a 10 ans, j’ai eu envie d’approfondir mes connaissances en allaitement. J’ai donc passé l’examen pour obtenir le diplôme de consultante en lactation IBCLC. Je me suis complètement réorientée dans la nutrition et l’allaitement il y a 3 ans, en devenant notamment la Responsable du programme pour l’Allaitement du Canton de Genève.

 

Quand et comment avez-vous commencé à vous intéresser à l’allaitement ? Comment se sont déroulés vos propres allaitements ?

A la naissance de mon premier enfant, Solène (qui a aujourd’hui 26 ans et qui vient de donner naissance à un petit garçon), j’ai rencontré des difficultés pour allaiter. C’est alors que j’ai été sensibilisée à la problématique de l’allaitement.

Mes deux allaitements suivants ont été moins difficiles, notamment grâce au soutien de La Leche League sur tous les aspects de l’allaitement et du maternage.

Quel a été votre parcours associatif et professionnel autour de l’allaitement ?

J’ai donc d’abord été animatrice bénévole pour La Leche League France et notamment Responsable du réseau des professionnels de santé. Depuis que je vis en Suisse, j’ai réduit mon engagement pour La Leche League France mais je suis toujours relectrice des « Dossiers de l’allaitement » : il s’agit d’une revue spécifiquement dédiée aux professionnels de santé, incluant des dossiers thématiques et des articles scientifiques.

En plus de mon activité de consultante en lactation IBCLC, j’ai été coordinatrice de la démarche WBTi (World Breastfeeding Trends Initiative) France pour l’élaboration du rapport de 2017. La WBTi est une initiative d’origine indienne, aujourd’hui utilisée au niveau international afin d’analyser les programmes et politiques d’allaitement dans chaque pays.

 

Vous avez vécu au Japon, en France et en Suisse. Quels sont vos constats ou retours d’expérience sur l’allaitement ?

Au Japon, l’allaitement long est courant et n’est pas socialement questionné. La manière de vivre traditionnelle (près du sol) est très proche des enfants : ils ont accès à tout. 

En France, c’est très particulier. Il y a 26 ans, on considérait l’allaitement comme une pratique de « hippie » et pas très moderne. Aujourd’hui, il existe un clivage entre les féministes anti-allaitement, et un féminisme qui souhaite conforter les femmes dans leur rôle de mère souhaitant vraiment allaiter.

En Suisse, le rapport à l’allaitement est différent : à la naissance, 95% des bébés sont allaités. Mais l’allaitement est généralement interrompu au bout de 3 ou 4 mois : 

  • par manque d’accompagnement, 
  • en raison de la pression liée à la reprise au travail, 
  • ou parce que les mamans souhaitent reprendre leur liberté. 

Le soutien aux mères allaitantes n’est pas suffisant à ce moment-là. 

Il est en tout cas très intéressant de constater combien le formatage culturel impacte la vision de l’allaitement. Les besoins des femmes sont pourtant les mêmes : pouvoir mener à bien un choix personnel sans subir la pression extérieure.

Comment positionneriez-vous la France à l’échelle internationale ?

Si on s’appuie sur le score WBTi, la France ne remplit pas 50% des critères. Certains pays en voie de développement sont parfois bien mieux notés que la France sur ce sujet.

La France dispose d’excellents outils théoriques (le rapport TURCK de 2010* et son plan d’action pour l’allaitement par exemple). Mais il manque la volonté politique et médicale (les médecins français ne sont encore pas assez formés).

74% des mamans démarrent un allaitement (mixte ou exclusif) à la maternité. Elles ont envie d’allaiter mais abandonnent rapidement. Cette forte majorité n’est pas reconnue dans l’accompagnement médical.

Par ailleurs, on constate une grande disparité selon les régions. La région Rhône Alpes par exemple, qui bénéficie d’un véritable soutien de l’ARS (Agence Régionale de la Santé), est particulièrement investie dans le soutien à l’allaitement. Dans d’autres régions, les forces vives sont plus éparpillées. 

Le constat final est qu’il y a tout ce qu’il faut en France : les bonnes recommandations, des médecins investis, des régions modèles… Mais nous aurions besoin de fédérer les actions, créer des synergies, mieux former les professionnels de santé, valoriser les initiatives pro-allaitement… et mettre un frein aux conflits d’intérêt, qui sont à la racine du problème.

 

Vous avez été coordinatrice de la démarche WBTi World Breastfeeding Trends initiative en France, notamment pour l’élaboration du Rapport WBTi France (publié en 2017).
Pouvez-vous brièvement nous présenter cet organisme ?

La WBTI (World Breastfeeding Trends Initiative) est une initiative lancée en Inde en 2005, qui vise à analyser les programmes et politiques d’allaitement au niveau mondial.

La WBTI s’appuie sur des outils d’analyse permettant à chaque pays de réaliser son propre audit interne. Les enquêtes reposent sur 15 indicateurs couvrant un éventail thématique très large : politiques d’allaitement, respect du Code international de commercialisation des substituts du lait maternel, protection maternelle, formation des professionnels de santé, allaitement en situation d’urgence…. Elles sont réalisées tous les 4 ans (la dernière datant de 2017 pour la France, et de 2020 pour la Suisse).

Les résultats de chaque pays sont ensuite collectés et compilés par les équipes indiennes en vue d’être comparés.

Cette approche très complète permet ainsi d’aborder tous les sujets relatifs à l’allaitement, de comparer les pays et d’évaluer aussi les progrès au niveau de chaque pays.

 

Quelles ont été les principales conclusions de ce rapport sur l’allaitement en France ?

Le (dernier) rapport de 2017 souligne un très bon niveau de la France sur le plan des recommandations, mais de mauvais résultats pour la mise en pratique.

15 recommandations-clés ont été proposées à l’issue de ce rapport, parmi lesquelles la création d’un Comité national pour l’allaitement, le renforcement de la formation initiale pour les professionnels de santé, ou encore l’allongement du congé maternité à 6 mois pour toutes les femmes et dès le premier enfant.

Découvrir les 15 recommandations du rapport WBTI France de 2017

 

Aujourd’hui, vous résidez en Suisse et vous êtes consultante auprès de l’Association Genevoise pour l’Alimentation Infantile (GIFA) qui joue le rôle de bureau de liaison du Réseau International d’Action pour l’alimentation infantile (IBFAN).

Pourriez-vous nous expliquer ce qu’est le réseau IBFAN ?

L’IBFAN (International Baby Food Action Network) est un réseau regroupant initialement des petites associations de soutien à l’allaitement maternel et des ONGs humanitaires préoccupées par la santé infantile.

Sa première mission était de faire rédiger par l’OMS un code au sujet de la commercialisation des substituts du lait maternel. Dans les années 70, le marketing et la publicité réalisés autour de ces produits avaient en effet engendré de graves conséquences pour la santé des bébés (comme l’évoque par exemple le film Tigers, qui retrace l’itinéraire d’un vendeur de lait maternel artificiel au Pakistan).

 

Et quel est le rôle de l’Association Genevoise pour l’Alimentation Infantile (GIFA) ? Quelle y est votre mission ?

La GIFA est l’IBFAN Suisse. Son rôle est d’être un bureau de liaison avec les institutions internationales : la GIFA est ainsi le point de contact pour participer aux réunions avec l’OMS, le Haut Commissariat des Droits de l’Homme, le comité des Droits de l’enfant, la représentation à l’AMS (Assemblée mondiale de la santé, le « parlement » de l’OMS)…

En ce qui me concerne, je couvre le volet local pour le canton de Genève, en tant que consultante pour le programme cantonal de santé.

 

Vous intervenez plus particulièrement sur le programme genevois de prévention de l’obésité (infantile et maternelle) « Marchez et mangez malin ! ».
En quoi consiste ce programme ?

Ce programme est né du constat d’un problème dobésité chez 10% des adultes et 5% des enfants en Suisse. L’objectif est donc de lutter contre l’obésité par des actions de prévention et dinformation sur la nutrition.

Le problème d’obésité est adressé dès la grossesse, pour les mamans déjà en surpoids. Puis au moment de l’allaitement, pour la partie préventive.

L’enjeu de l’allaitement sur l’obésité, et sur la santé en général, est considérable car l’allaitement contribue à un microbiote sain et un système immunitaire robuste dès la petite enfance. Il permet d’éviter les maladies non transmissibles telles que cancers, diabètes, maladies cardio-vasculaires…, qui sont par ailleurs des facteurs de co-morbidité aggravant la COVID-19.

Une première étude réalisée tout récemment en Angleterre montre d’ailleurs que les adultes ayant été allaités quand ils étaient enfants ont 12% moins de risques de tomber malade de la COVID 19.

 

S’il ne devait y en avoir qu’un, quel serait votre meilleur conseil à l’attention des futures mamans qui se préparent à allaiter leur bébé à venir ?

Je conseillerais aux futures mamans de profiter de la grossesse pour prendre beaucoup d’informations auprès d’autres mamans qui ont allaité.

Il ne faut pas idéaliser l’allaitement, mais se dire qu’en cas de difficultés, il existe des solutions.

L’allaitement est naturel mais pas automatique : comme pour manger, il doit y avoir un apprentissage.

Il est également important de voir des mamans allaiter, d’avoir des retours d’expérience variés (dans des réunions si ce n’est pas dans sa propre famille) pour pouvoir se préparer. Les vraies spécialistes de l’allaitement, ce sont les mamans qui ont su écouter leur bébé. 

 

Si vous disposiez d’une baguette magique, que changeriez-vous en France pour faire progresser les taux d’allaitement maternel ?

J’intégrerais l’allaitement dans tous les cursus scolaires et universitaires pour faire évoluer les regards.

En relayant des images de bébés allaités dans les livres d’enfants, en intégrant l’allaitement dans les cours de biologie, dans les cursus liés à la santé bien sûr, mais aussi en philosophie et dans tous les autres domaines. L’allaitement est la suite naturelle de la grossesse.

 

Un petit mot sur VanillaMilk ?

C’est très bien de créer ce réseau pour l’allaitement et le maternage.

VanillaMilk a réussi à se positionner en dehors des conflits d’intérêt, ce qui lui offre la possibilité de s’ouvrir à de nombreuses structures qui soutiennent également l’allaitement.

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