Ancienne présidente de l’association La Leche League France, Corinne Dewandre est aujourd’hui praticienne en naturopathie et co-directrice de l’Ecole Synergie Naturopathie.
Ayant développé un fort intérêt pour les problématiques d’allaitement et d’accompagnement des jeunes mamans, Corinne propose au sein de son école un module de formation spécifiquement dédié à l’allaitement.
Dans cette interview, Corinne Dewandre nous explique ce qu’est la naturopathie, pourquoi envisager d’y avoir recours et comment elle peut aider les jeunes mamans, notamment dans le cadre de leur allaitement.
jour Corinne et merci d’avoir accepté cet échange. Pour commencer, pourriez-vous vous présenter en quelques mots ?
Je m’appelle Corinne. J’ai 52 ans et je suis belge. Je suis actuellement co-directrice d’une école de naturopathie appelée Ecole Synergie Naturopathie.
J’ai 4 enfants, que j’ai allaités. L’allaitement a occupé une grande place dans ma vie puisque j’ai allaité en continu pendant 12 ans.
J’ai également consacré cette période à accompagner des mamans allaitantes au sein de La Leche League France, dont j’ai notamment été présidente.
Pouvez-vous nous parler de votre parcours professionnel et associatif ?
J’ai suivi des études de droit par tradition familiale, mais je me suis très vite rendu compte que je voulais être mère à plein temps.
Puis, toutes ces années d’allaitement et de travail à La Leche League m’ont donné envie de me consacrer à la naturopathie, basée sur le respect des lois de la nature.
Et l’allaitement maternel en fait bien-sûr naturellement partie.
A cette période de votre présidence à La Leche League, quels ont été vos constats relatifs à l’allaitement ?
Concernant l’allaitement, en France, il y a à la fois une réelle pression, un discours moralisateur (« il faut allaiter »), et un manque de connaissances et de soutien de la part du monde médical.
Contrairement aux cultures nordiques, notre culture n’encourage pas du tout l’allaitement : on ne s’attend pas à ce que les mères allaitent, ou du moins pas trop longtemps. On suppose qu’elles vont forcément rencontrer de nombreux problèmes.
Je préférerais que ce soit l’inverse : que l’on puisse soutenir et informer les mamans sans leur faire la morale. Une maman éloignée de sa famille ou n’ayant autour d’elle personne n’ayant allaité doit pouvoir être rassurée, savoir qu’il est normal que son bébé pleure ou qu’il réclame les bras.
Vous êtes aujourd’hui devenue experte en naturopathie. Pouvez-vous nous expliquer de quoi il s’agit ?
La naturopathie est issue d’un courant américain datant de la fin du XIXe, début du XXe siècle.
Au niveau étymologique, « naturopath » signifie « chemin de la nature ». L’idée est donc celle d’un retour aux sources, à l’inverse de ce qui est prôné par une société industrielle. Dans la société industrielle, l’homme s’affranchit des lois de la nature dans une optique consumériste, sans tenir compte de ce qui est le plus favorable pour la santé d’une personne.
La naturopathie s’adresse à tous : hommes, femmes, mamans, futures mamans…
La démarche consiste à accompagner une personne dans sa recherche d’elle-même, dans la connaissance de son anatomie et de son fonctionnement. On aide la personne à mieux comprendre sa santé, à trouver ce qui est bon pour elle en l’informant.
On consulte donc un naturopathe pour prendre la responsabilité de sa santé et combler ses besoins, qu’ils soient physiques ou physiologiques. La naturopathie relève en effet d’une approche holistique qui inclut le corps, les émotions…
La démarche est ainsi différente de celle d’un médecin, qui a plus pour vocation de poser un diagnostic et de conseiller un traitement.
Sur quelles techniques vous appuyez-vous en naturopathie ?
Les techniques naturopathiques se fondent sur la connaissance de l’anatomie et de la physiologie.
Elles comportent :
- L’hygiène alimentaire et l’hygiène de vie, qui doivent convenir aux besoins spécifiques de la personne
- L’hydrologie, avec un usage de l’eau en interne ou en externe
- L’air, avec des techniques respiratoires
- Le mouvement, qui désigne l’activité sportive
- La phytologie, c’est-à-dire le recours aux plantes comme les bourgeons d’arbres (qui sont un concentré de vitalité), les fleurs de Bach, les huiles essentielles (mais qui ne sont par exemple pas recommandées pour les mères enceintes ou allaitantes)
- Les techniques manuelles, qui peuvent être dispensées aux mamans comme aux bébés. Nous, humains, avons besoin de contact physique ; nous avons besoin d’être en lien avec les autres. Nous faisons partie des primates, et les bébés ont ce besoin d’être collés à leur maman. D’ailleurs, connaître ce besoin et le respecter est un gage de réussite de l’allaitement.
- Les techniques de bilan, comme l’iridologie, basée sur l’étude de l’iris des yeux pour évaluer un état de santé, la morpho-typologie, la réflexologie plantaire ou palmaire, le bilan oriental (observation de la couleur de la peau, de la langue, des ongles…).
Dans quels cas une maman ou future maman peut-elle être amenée à consulter un naturopathe ?
La naturopathie peut aider les jeunes couples qui rencontrent des problèmes de conception. On peut travailler avec la maman mais aussi avec le papa, pour débarrasser le corps de certains polluants et drainer les organes comme le foie ou les reins.
Pour les femmes qui souhaitent être enceintes, il est important, si elles le peuvent, de faire une grosse détoxification au préalable. Le lait maternel étant un fluide corporel comme les autres, il doit être le moins contaminé possible. D’où l’importance de manger bio, de nettoyer le foie et de drainer le corps, pour que les éléments toxiques ne soient pas transmis au bébé et ne se retrouvent pas plus tard dans le lait maternel.
Au cours de la grossesse, la naturopathie permet d’apporter une aide personnalisée, ainsi qu’un soutien moral et émotionnel. En tant que naturopathes, nous sommes éducateurs de santé et accompagnants émotionnels. Les jeunes mamans ont besoin d’avoir confiance. Or, elles ne sont parfois pas suffisamment accompagnées.
Au moment de l’allaitement, une mère souhaitera par exemple comprendre la physiologie de l’allaitement ou le fonctionnement d’une glande mammaire. Cet accompagnement peut être dispensé par une infirmière ou une sage-femme, mais ces dernières ne sont pas toujours formées. En naturopathie, il existe des formations spécifiquement dédiées à l’allaitement, que j’ai d’ailleurs mises en avant dans le cursus de mon école Synergie Naturopathie.
La naturopathie permet également d’enseigner aux mamans à masser leur bébé.
Comment se forme-t-on à la naturothérapie ? Existe-t-il des accréditations ou reconnaissances spécifiques pour être certain de s’adresser à un professionnel qualifié ?
La naturopathie est enseignée en France par différentes écoles privées.
Pour devenir organisme de formation, il faut effectivement être enregistré auprès de l’administration. Mieux vaut donc s’adresser à des écoles enregistrées. Si leur formation est certifiée Qualiopi, c’est un gage de qualité. A ce jour, aucune formation en naturopathie n’est encore inscrite au RNCP (Registre National des Certifications Professionnelles). Le jour où ce sera le cas, cela signifiera que les naturopathes titulaires de la formation en question disposeront d’une certification d’état.
A l’heure actuelle, il n’est pas évident de connaître la formation des naturopathes à qui on peut s’adresser. En effet, des personnes ayant suivi une formation de 12 heures sur Internet ont le même titre que celles qui ont suivi un enseignement de 1 200 heures.
Souvent, les naturopathes annoncent sur leur site de quelle formation ils sont issus… mais il n’est pas facile de s’y retrouver !
Quels seraient vos conseils de naturopathe pour favoriser l’allaitement ?
En naturopathie, la démarche consiste davantage à chercher les besoins qu’à faire taire les symptômes. Ainsi, nous aurons plus tendance à identifier la cause d’un problème qu’à recommander une plante pour faire taire le symptôme.
Imaginons une maman qui a un manque de lait. La solution n’est pas de lui conseiller une plante, mais de chercher la cause. L’hypothyroïdie ou la pilule peuvent, par exemple, être à l’origine des problèmes d’allaitement. Dans ce cas, la naturopathie peut être une solution car on aura ciblé la cause et on pourra agir dessus.
Quoi qu’il en soit, le corps est suffisamment bien fait pour qu’une maman réussisse à allaiter sans avoir besoin de plantes.
Comment se déroule un accompagnement de naturothérapie ?
Il n’y a pas de règle : le client décide ce dont il a besoin. Il est possible de consulter une seule ou plusieurs fois. La première consultation est toujours plus longue : on utilise les techniques de bilan qui permettent de bien comprendre le fonctionnement de la personne.
Une première consultation contient donc une phase de questionnaire et une technique de bilan.
Dans le compte-rendu (en général 4 à 5 pages), de nombreuses possibilités et conseils sont évoqués. Aux personnes de décider ensuite ce qu’elles souhaitent faire, avec plusieurs propositions possibles sur le régime alimentaire, les émotions…
S’il ne devait y en avoir qu’un, quel serait votre meilleur conseil à l’attention des futures mamans qui se préparent à allaiter leur bébé à venir ?
Mon principal conseil serait de se faire confiance et de faire confiance à son corps : nous sommes issus de millénaires de mères ayant allaité leur fille qui à leur tour ont allaité leur bébé.
La nature est parfaite, et le corps de chacune de ces mamans est capable de produire tout le lait nécessaire, dans exactement les bonnes propositions nutritives, en procurant tout l’amour et la chaleur maternels dont aura besoin le bébé.
Si vous disposiez d’une baguette magique, que changeriez-vous en France pour faire progresser les taux d’allaitement maternel ?
Sans hésiter, je rajouterais un enseignement solide sur l’allaitement dans les cursus médicaux et naturopathiques.
Un petit mot sur VanillaMilk ?
C’est un bonheur pour moi de voir que des générations plus jeunes que la mienne s’investissent pour que les mamans puissent allaiter leur bébé comme elles le souhaitent (si bien-sûr elles le souhaitent), avec le soutien dont elles ont besoin.
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